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L’après-Fiona : Données et connaissances des citoyens en vue du rétablissement et de la planification future à l’Î.-P.-É.

Image aérienne d'un littoral de l'Île-du-Prince-Édouard qui s'est érodé tout près des habitations.
Eva Thorpe, Emma Poirier + Stephanie Arnold

novembre 7, 2023

Crédit photo: UPEI School of Climate Change and Adaptation Drone Team, Savage Harbour, PEI, D. E. Jardine.

Introduction

Il y a un peu plus d’un an, l’ouragan Fiona a causé d’importants dégâts dans tout le Canada atlantique (Mulligan, 2022; Santa Maria, 2022). Depuis, un certain nombre de rapports et d’analyses sur les conséquences de l’ouragan ont été publiés, y compris en juin 2023 un rapport sur les laisses de marée haute et l’érosion des côtes à l’Île-du-Prince-Édouard (Î.-P.-É.).

Le document des notes de terrain accompagnées de photos intitulé Post Tropical Storm Fiona Highwater Mark and Shoreline Erosion Field Notes with Photos est un compte rendu des dommages causés par Fiona à 56 endroits le long des côtes de l’Île-du-Prince-Édouard. Don Jardine, l’auteur du rapport, a examiné et mesuré les impacts en interrogeant les résidents locaux à chaque endroit recensé et en recueillant des données instrumentées. Les données relatives à la laisse de marée haute, au maréomètre et à la station météorologique, ainsi que les cartes et les graphiques illustrant les impacts sont fournis. L’objectif est d’aider les propriétaires, les associations, les professionnels, les municipalités et les gouvernements provinciaux (Jardine, 2023, p. 1) à mieux planifier et se préparer en vue des futures tempêtes.

Plus précisément, le rapport présente des informations pour aider à : 

  • identifier les zones à risque;
  • prédire les inondations;
  • documenter la vulnérabilité côtière; et élaborer des cartes d’inondation pour les terres basses qui subissent des ondes de tempête (Jardine, 2023, p. 1). 
Carte satellite d'une côte de l'Île-du-Prince-Édouard avec une route parallèle à la côte.

Crédit photo: Planet Satellite Photo Ebbsfleet, D.E. Jardine.

Le pouvoir des données et des connaissances des citoyens

Les tempêtes et les ouragans ne sont pas nouveaux au Canada atlantique. Avec le temps, les résidents, les collectivités, les organisations et les gouvernements ont amélioré leur compréhension des risques, ont augmenté la complexité des réponses et ont développé de nouvelles façons de se remettre ensemble des événements extrêmes. Comme les changements climatiques ont des répercussions de plus en plus importantes sur les mêmes régions, les mesures d’adaptation prises par le passé ne sont désormais plus suffisantes.

Le chemin Barbara Weit, dans l’Île-du-Prince-Édouard, est un exemple de zone qui a été inondée à plusieurs reprises et pour laquelle il faudrait une meilleure approche en matière d’adaptation. « En plus de 60 ans à cet endroit, c’est la pire inondation que [les résidents] aient jamais connue lors d’une onde de tempête », écrit Jardine dans ses notes de terrain de l’après-Fiona (p. 53). Les ondes de tempête sont monnaie courante dans cette région, mais pour éviter des inondations encore plus graves, de nouvelles mesures d’adaptation s’imposent.

Les données contenues dans les notes de terrain de l’après-Fiona fournissent également des informations précieuses pour la validation des modèles et des systèmes de projection des inondations utilisés pour la préparation (à court terme) et la planification (à long terme) aux situations d’urgence. À chaque nouvelle grosse tempête, les scientifiques en apprennent davantage sur les tempêtes et sur leurs impacts. Par exemple, lorsqu’on essaie de déterminer la fréquence des fortes tempêtes, le fait de disposer d’enregistrements à long terme des conditions de tempête permet d’améliorer la précision des projections futures. 

Les données qualitatives sur les conditions des tempêtes fournissent un contexte supplémentaire pour valider les modèles et les cartes. Voici ce qu’ont décrit deux résidents :

  • « Buster a dit que lorsque la marée était censée être basse, elle n’avait perdu qu’un pied ou deux, ce qui était inhabituel » (Jardine, p. 3); et 
  • « M. Doucette a déclaré qu’il s’agissait de la pire tempête qu’il n’ait jamais connue, le vent hurlant à un niveau qu’il n’avait jamais entendu auparavant. » (p. 79) 

Buster a qualifié « d’inhabituelle » la baisse (ou l’absence de baisse) de la marée (p. 3), ce qui implique que la marée était plus haute que prévu, par rapport aux tempêtes précédentes. Cela témoigne de l’intensité de Fiona, le niveau de l’eau étant plus élevé que d’habitude en raison de l’onde de tempête et de la faible pression, et ce, en dépit d’un vent du large. En tant que tempête record, Fiona a mis à l’épreuve la capacité de la région à se préparer à une tempête d’une ampleur inédite. La possibilité d’utiliser les observations et les données instrumentées pour mieux informer les systèmes de préparation aux situations d’urgence et de projection des inondations pourrait aider à planifier en vue de la prochaine tempête record. 

Le témoignage de M. Doucette sur l’intensité du vent et le bruit qu’il faisait atteste la rareté de tels vents dans l’île. Son témoignage se distingue également des autres points de vue des citoyens, qui ont principalement porté sur l’eau. L’étendue et l’ampleur des pertes d’arbres et des dommages causés aux infrastructures à l’intérieur des terres n’étaient pas courantes lors des tempêtes précédentes. Il faudrait donc également envisager et étudier des mesures d’adaptation aux vents violents en prévision des tempêtes futures.

Les données, les cartes d’inondation et les images aériennes présentées dans les notes de terrain de l’après-Fiona aideront les habitants de l’Île-du-Prince-Édouard et de l’ensemble du Canada atlantique à comprendre quelles seront les zones vulnérables lors d’événements similaires. Grâce à ces informations, ils peuvent se préparer aux futures tempêtes, minimiser les dommages potentiels et ensuite se remettre des dommages inévitables. Il est important de noter que tout le monde ne vit pas les tempêtes de la même manière. Il existe des inégalités dans l’aptitude et la capacité de chaque résident, ménage ou collectivité à se préparer et à réagir. La planification future doit en tenir compte.

Conclusion 

Étant donné que les tempêtes et les ouragans devraient devenir plus intenses et causer davantage de dégâts dans un contexte de changements climatiques (Mulligan, 2022; Colbert, 2022), il faudra trouver de nouvelles méthodes de préparation et d’intervention. La présente approche décrit la préparation comme un processus à multiples facettes, intégrant différents aspects en combinant les données recueillies par des équipements scientifiques avec le témoignage des habitants. Elle renforce la capacité à identifier les zones à risque, à prévoir les inondations, à documenter la vulnérabilité côtière et à établir des cartes (Jardine, p. 1), ce qui permet aux habitants et aux collectivités d’établir des priorités dans les réponses à apporter. Cela permet également de briser les silos de l’action en faveur d’une action collective et interdisciplinaire, ce qui s’imposera pour éviter que les témoignages recueillis après Fiona ne se généralisent à l’avenir.

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